Adultère au Maroc et nationalité française: quand deux législations entrent en conflit pour un binationl condamné

Le jeudi 11 janvier, un homme possédant la double nationalité marocaine et française a été jugé à Paris pour adultère. Cette affaire exceptionnelle a suscité l’attention, car le parquet de Paris demande la révocation de sa nationalité française en raison de cette condamnation. Les avocats du plaignant soulignent pourtant que l’adultère n’est plus considéré comme une infraction en France depuis 1975.
L’histoire remonte à mai 2021, lorsque Rahim (nom modifié), originaire de Marrakech au Maroc, a obtenu la nationalité française après son mariage en 2008 avec une ressortissante française, rapporte Le Parisien. Quelques mois plus tard, en octobre 2021, il a été condamné à six mois de prison pour adultère par un tribunal marocain en appel. Le parquet de Paris a pris l’affaire en main et demande maintenant à priver Rahim de sa nationalité française.
En vertu du Code civil, le parquet a la possibilité de contester l’attribution de la nationalité « en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte ». Or, selon la loi, « la cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l’enregistrement de la déclaration (…) constitue une présomption de fraude ». Selon l’accusation, « l’existence d’une relation extraconjugale durable est incompatible avec l’existence d’une communauté de vie commune », qui est une condition préalable pour obtenir la nationalité française.
L’épouse trompée soutient également la demande du parquet. Elle demande également que la nationalité française lui soit retirée. Elle a écrit au Consulat de France au Maroc en janvier 2022 : « Je m’oppose à ce qu’il conserve la nationalité française et obtienne un passeport français. Il ne mérite pas l’honneur d’être français, car je réalise qu’à partir du début, notre mariage avait pour seul but l’obtention de cette nationalité et d’un passeport français ».
La défense, de son côté, souligne que l’adultère n’est plus considéré comme un délit en France depuis 1975. Les avocats de Rahim s’indignent : « Une condamnation dans un pays étranger pour des faits qui ne sont pas pénalement répréhensibles en France ne saurait en aucun cas justifier une décision visant à annuler une déclaration relative à l’obtention de la nationalité française (…). Si notre client ne conteste pas une relation intime extraconjugale, il est incompréhensible de voir le parquet s’ériger en gardien de la morale et justifier ainsi sa demande ».
Les avocats rejettent également l’idée selon laquelle Rahim et son épouse auraient contracté un « mariage blanc ». « Notre client, marié depuis 2008, aurait pu faire cette demande depuis de nombreuses années, donc on ne peut absolument pas prétendre qu’il a contracté un mariage blanc. Il n’a pas fait sa demande pour des raisons économiques, mais pour faciliter les liens avec ses enfants. Le priver de sa nationalité aurait des conséquences sur sa vie familiale ». La décision de justice sera rendue le 29 février.