Allocution d’ouverture de la 17ème Session de l’AP-UpM par M. Rachid Talbi El Alami, Président de la Chambre des Représentants."/>

Allocution d’ouverture de la 17ème Session de l’AP-UpM par M. Rachid Talbi El Alami, Président de la Chambre des Représentants.

Allocution d’ouverture de la 17ème Session de l’AP-UpM par M. Rachid Talbi El Alami, Président de la Chambre des Représentants.

Au Nom de Dieu le Clément, le Miséricordieux,

 

Cher(e)s Collègues, Présidents des Assemblées législatives,

Cher(e)s Collègues, membres des délégations,

Excellences Mesdames et messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames et messieurs,

J’ai le plaisir de déclarer ouverte la 17ème Session de l’Assemblée parlementaire de l’Union pour la Méditerranée, ici dans la capitale du Royaume du Maroc, faisant suite aux réunions du Sommet des Présidents, des Commissions permanentes de l’Assemblée et de son Bureau élargi qui se sont tenues hier.

Je tiens à vous souhaiter encore une fois la bienvenue à la Chambre des Représentants du Maroc et à vous exprimer mes sincères remerciements d’avoir répondu favorablement à notre invitation, en gage des liens qui unissent nos pays et qui reflètent notre détermination collective à poursuivre l’action parlementaire euro-méditerranéenne commune dans le cadre de notre Assemblée parlementaire. Cette Assemblée commémorera dans exactement un mois son 20e anniversaire depuis sa création, et marquera les 26 ans écoulés depuis sa forme initiale : le Forum parlementaire euro-méditerranéen.

À cette occasion, nous devrions rappeler le processus de création de cette Assemblée, qui a été décisif mais pas toujours aisé. Il convient, à cet égard, de mentionner la contribution des fondateurs, en l’occurrence le regretté Abdelouahed Radi et le regretté José Maria Gill Roblès qui, fruit du hasard, ont vu le jour la même année et nous ont quittés l’année dernière, parcourant les mêmes périodes historiques et leurs vicissitudes. Je voudrais également mentionner Madame la Présidente Nicole Fontaine et d’autres personnes qui ont tous contribué remarquablement à jeter les bases du bras parlementaire qui a accompagné le processus de Barcelone.

Le processus fondateur s’est déroulé dans le sillage et le contexte des progrès majeurs qu’ont connus les relations internationales: la fin de la guerre froide, les accords d’Oslo et leur aboutissement à la Conférence de Madrid pour la paix au Moyen-Orient, et les accords de Washington qui ont couronné ce processus, et ultérieurement le lancement du processus de Barcelone qui a raffermi la dimension parlementaire et insisté sur celle-ci en tant que mécanisme de soutien au partenariat euro-méditerranéen.

Cependant, où en sommes-nous aujourd’hui des espoirs que toutes ces dynamiques avaient suscités?

Force est de constater que nous sommes confrontés à un bilan mitigé, voire paradoxal.

Nos partenariats économiques ont réalisé beaucoup d’acquis grâce à la dynamique et l’implication du secteur privé, au soutien gouvernemental et institutionnel des deux rives, et à l’engagement louable de l’Union européenne dans des projets structurants. De même, les échanges sont facilités et diversifiés par le biais des accords avancés, tant bilatéraux que multilatéraux.

Les quinze années qui se sont écoulées depuis le lancement du processus de Barcelone ont été marquées par des dialogues politiques et multilatéraux entre les deux rives de la Méditerranée aux niveaux gouvernemental et parlementaire, entre les collectivités territoriales, au niveau des entreprises, des associations civiles, des universités et entre les universitaires, constituant de la sorte une véritable avancée dans la région, car plusieurs accords d’association ont été signés entre l’Union européenne et les pays partenaires du Sud et de l’Est de la Méditerranée.

Ces partenariats ont ouvert des perspectives prometteuses pour les échanges commerciaux, la libéralisation des marchés, l’implantation des investissements et la création de projets conjoints.

Notre partenariat a donné lieu à un certain nombre d’histoires de réussite dans le domaine des projets industriels communs, de l’environnement, de l’économie verte, de l’agriculture et de la pêche.

Nous avons également atteint un certain nombre d’objectifs dans les domaines des droits humains et des femmes, de l’égalité des sexes, de la coopération entre les sociétés civiles, de la gouvernance et du soutien institutionnel, notamment à travers des programmes de jumelage institutionnel financés par l’Union européenne, et d’aide au développement.

L’essentiel réside dans ce que nos pays gagnent grâce à la coordination sécuritaire et à l’action commune contre le terrorisme et l’extrémisme, nous permettant ensemble de déjouer des complots terroristes odieux, et de démanteler de nombreuses cellules terroristes. C’est une occasion pour saluer et remercier les services de sécurité de nos pays.

Le partenariat exigeait, entre autres, des réformes audacieuses que les pays du Sud ont adoptées. Il s’agit de réformes appropriées qui ont impliqué des coûts sur le plan social et financier, et qui ont exigé des secteurs public et privé de se conformer aux normes et aux exigences européennes de qualité dans un court laps de temps, sachant qu’il a fallu des décennies d’accumulation dans les pays membres de l’Union européenne.

Tout en reconnaissant que les réformes constituent un besoin national interne, et non une réponse à une quelconque pression, nous devons néanmoins reconnaître que les réformes sont coûteuses et nécessitent une certaine accumulation.

Mesdames et Messieurs,

Certes, il faut renforcer les accords et les mécanismes qui nous rassemblent, garantir leur sécurité juridique, les protéger des allégations des groupes de pression, des parties intéressées et des «contestations» fondées sur les idées reçues et les stéréotypes, mais notre partenariat euro-méditerranéen en général doit être renouvelé au niveau du dialogue politique et institutionnel qui encadre les relations et les échanges entre les divers secteurs et dans les autres activités.

Il s’agit d’une nécessité impérieuse de faire renaître la confiance dans notre partenariat afin de trouver des réponses aux questions qu’impose le contexte actuel et aux nouveaux et anciens défis que confronte notre région euro-méditerranéenne.

Permettez-moi de passer en revue quelques-uns de ces défis que nous devons relever ensemble pour que nous puissions redonner au bassin euro-méditerranéen ses rôles, son statut cosmique et son rayonnement.

Le soi-disant printemps arabe a eu des effets dévastateurs sur certains pays de la Méditerranée orientale et méridionale, dans la mesure où de nombreux groupes ont profité des périodes de transition et de la faiblesse de l’État pour semer le chaos et entraver le processus d’instauration des institutions nationales. L’ingérence étrangère a aggravé la vulnérabilité de ces situations, entraînant de vastes mouvements de déplacement, d’asile et de migration.

Le conflit au Moyen-Orient demeure au centre des conflits régionaux, donnant lieu à beaucoup d’autres conflits. La cause du peuple palestinien reste au cœur de l’instabilité au Moyen-Orient. Dans ce conflit, nous devons nous pencher sur le nœud du problème, à savoir mettre fin à l’occupation des territoires palestiniens et permettre au peuple palestinien d’exercer son droit à l’indépendance et à l’établissement de son État indépendant sur son territoire national : un État souverain et viable, vivant en paix et en coexistence avec le reste des États de la région.

À court terme, la communauté internationale ne devrait pas accepter de solution en deçà de la garantie du droit du peuple palestinien à son État indépendant avec Al-Qods comme capitale, et sa protection afin qu’il puisse jouir de son droit à la vie, à la sécurité, aux institutions nationales et à l’identité.

Une fois de plus, les valeurs humaines sont aujourd’hui mises à l’épreuve, et la conscience humaine est confrontée à des responsabilités historiques.

Nous devons toujours garder à l’esprit que tant que les questions du Moyen-Orient ne sont pas réglées sur la base de la justice et du droit international, notre région euro-méditerranéenne demeurera otage de l’instabilité, des conflits et du chaos.

Que ce soit pour des raisons historiques, géopolitiques ou au nom de la conscience humaine, des valeurs, des intérêts et du souci pour l’avenir, le règlement du conflit israélo-arabe, dont l’essence est la question palestinienne, est primordialement une responsabilité euro-méditerranéenne. C’est donc l’occasion de rétablir le rôle de notre groupe pour mettre fin à cette destruction stratégique dans toutes ses dimensions.

Mesdames et Messieurs,

De nombreux défis persistent, et nous en sommes tous conscients, même si nous les abordons de différentes approches.

En ce qui concerne l’instabilité, nous sommes confrontés à l’extrémisme et au terrorisme qui trouvent leur terreau fertile dans le chaos, la pauvreté et l’absence d’institutions. S’il est nécessaire de continuer à adopter la réponse sécuritaire à l’égard des organisateurs, des financiers et des auteurs des projets terroristes, il est toutefois primordial d’assécher les sources du terrorisme et éliminer l’environnement qui le favorise, tout en continuant à consolider les libertés, la démocratie et les droits humains, et à diffuser une culture de la coexistence.

Ces défis et facteurs, ainsi que d’autres qui se situent en dehors et au-delà de l’espace euro-méditerranéen, contribuent à une recrudescence frappante de la migration irrégulière, de l’asile et du déplacement, avec toutes les tragédies humaines qui en découlent. La Méditerranée est devenue un couloir pour la perte de milliers de jeunes en quête d’espoir pour un travail, un gagne-pain, la sécurité, la liberté ou la protection contre l’intolérance sectaire ou ethnique.

Comme je l’ai mentionné hier devant Mesdames et Messieurs les Présidents, si les migrations dans notre bassin méditerranéen ont constitué un phénomène d’enrichissement, de brassage et de convergence culturelle intense, riche et unique, elles sont devenues aujourd’hui, malheureusement, une source de conflits, de racisme, de discrimination, et de stigmatisation de l’autre, nourrie par les médias de la désinformation. Plus encore, l’immigration est aujourd’hui au cœur des surenchères électorales dans un certain nombre de pays de la rive nord de la Méditerranée, où le nativisme et la xénophobie se trouvent en tête des programmes et des agendas de nombreuses formations politiques, constituant ainsi une carte non négligeable dans les surenchères électorales et un instrument pour gagner aux des élections.

À cet égard, il est nécessaire de ne pas perdre de vue les modèles réussis de l’intégration et de la gestion communes du phénomène de la migration irrégulière entre le Nord et le Sud, tels que l’incarne le modèle que je connais parfaitement, à savoir le modèle de coopération multiforme entre les Royaumes du Maroc et de l’Espagne pour faire face à ce phénomène. L’ensemble des partis, des forces, des intellectuels et des institutions démocratiques dans le Nord, sont appelés à inverser l’équation qui consiste à lier les problèmes des sociétés européennes au phénomène migratoire, à faire face aux discours xénophobes, et à garder à l’esprit les rôles historiques des migrants dans l’économie d’un certain nombre de pays européens, ainsi que la contribution de beaucoup de ces migrants, leurs enfants et leurs concitoyens, au rayonnement scientifique, culturel et sportif de ces pays.

Cher(e)s Collègues,

Mesdames et Messieurs,

En 2023, la région euro-méditerranéenne a enregistré les niveaux de température les plus élevés jamais enregistrés, et les incendies ont endommagé de vastes zones forestières. Cela signifie que le Bassin méditerranéen souffre plus que d’autres parties du monde des effets des déséquilibres climatiques. À cela s’ajoutent le stress exercé sur les sols, la destruction des forêts, la surexploitation des ressources marines et la sécheresse.

Encore une fois, nous confrontons une responsabilité éthique de préserver le Bassin et revaloriser son environnement. En plus des migrations et de l’appauvrissement causés par ces facteurs, l’humanité risque de perdre, à cause de la pollution excessive du bassin méditerranéen, l’une des sources de nutrition les plus riches, les plus diversifiées et les plus utiles au monde, ainsi qu’une composante importante du patrimoine naturel de l’humanité qui a servi de socle aux plus anciennes civilisations.

Cher(e)s Collègues,

Le rappel d’un certain nombre de défis auxquels nous sommes confrontés relève de la responsabilité et de la volonté de développer nos partenariats, sachant que les modèles de réussite sont nombreux dans le partenariat, la coopération et la créativité, dont le plus récent, le plus symbolique et le plus historique est le fait que le Maroc, l’Espagne et le Portugal remportent l’honneur d’organiser la Coupe du monde de 2030. Cette réussite est l’expression des charges historiques, civilisationnelles et culturelles, et des liens historiques uniques qui unissent nos peuples.

Comme cela s’est toujours avéré, le Maroc, fidèle aux traditions de la coexistence, du vivre-ensemble, de la modération et de la liberté, n’hésitera pas à aller de l’avant dans son engagement positif et actif pour la redynamisation du partenariat euro-méditerranéen. De même, la Chambre des Représentants marocaine, qui a été parmi les principaux fondateurs de la dimension parlementaire euro-méditerranéenne et de son développement, poursuivra son engagement positif dans le cadre de ce processus, ainsi que sa présence propositionnelle, fondée sur ses relations avec les différentes composantes du partenariat euro-méditerranéen et sur son expérience institutionnelle, nourrie de son modèle démocratique institutionnel authentique et bien enraciné, conduite par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste.

Nous continuerons inlassablement à prôner le respect des obligations mutuelles, la non-ingérence dans les affaires intérieures d’autrui et, avant tout, le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté des États en tant que ligne rouge dans les traditions internationales contemporaines.

Encore une fois, je vous renouvelle mes souhaits de bienvenue et vous remercie de votre attention.

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