Ramadan : Le Poulet Se Prend pour du Caviar

Ramadan : Le Poulet Se Prend pour du Caviar
Le Poulet Se Prend pour du Caviar

À l’approche du mois sacré de Ramadan, les consommateurs marocains assistent à une ascension vertigineuse des prix des volailles, transformant le poulet, jadis accessible à tous, en un produit presque de luxe. Tandis que les professionnels du secteur avancent des explications peu convaincantes et que le ministère de tutelle reste muet, les ménages, eux, s’interrogent : manger du poulet est-il en train de devenir un privilège réservé à une élite ?

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Dans les marchés et abattoirs de Casablanca, le kilo de poulet atteint désormais 25 DH, contre un prix nettement plus bas il y a encore quelques semaines. Même les quartiers réputés pour leurs tarifs avantageux, comme l’ancienne médina, affichent des prix exorbitants, poussant certains commerçants, comme Francis, à abandonner leur activité. « Je n’arrive plus à joindre les deux bouts », confie-t-il, résigné.

Pour Youssef Alaoui, président de la Fédération interprofessionnelle du secteur avicole (FISA), cette flambée est attribuable à deux facteurs : une forte concentration de la demande et une multiplication des intermédiaires. Des explications qui laissent les consommateurs perplexes, surtout que les intrants nécessaires à l’élevage, comme le soja et le maïs, sont en baisse sur les marchés internationaux. Alors, pourquoi le prix continue-t-il de grimper ?

Bouazza Kharrati, président de la Fédération marocaine des droits des consommateurs, n’hésite pas à parler de « hausse inquiétante » et appelle à une enquête sur une possible entente entre les producteurs de poussins. Selon lui, le Maroc affiche des prix bien supérieurs à ceux de ses voisins du bassin méditerranéen, laissant planer le doute sur d’éventuelles pratiques anticoncurrentielles.

Dans ce contexte, la FISA propose de moderniser le secteur en encourageant les abattoirs industriels et en transformant les points de vente informels en structures agréées. Une démarche prometteuse, certes, mais qui n’a pour l’instant produit aucun effet concret pour soulager les portefeuilles des ménages. Quant au ministère de l’Agriculture, il se contente de déclarations vagues, sans mesure tangible pour freiner cette envolée des prix.

À quelques semaines de Ramadan, cette hausse des prix des volailles place les consommateurs face à un dilemme : se tourner vers une viande rouge hors de prix ou vers un poisson dont les fluctuations de prix suivent la saisonnalité et le repos biologique. Une équation insoluble pour nombre de foyers marocains.

Ainsi, le poulet, autrefois roi des tables populaires, semble désormais emprunter une trajectoire bien éloignée de celle de son humble réputation. Une chose est sûre : en 2024, même les ailes de poulet veulent voler haut.

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