Sarkozy, un ex-président derrière les barreaux : la France face à un tournant judiciaire
Nicolas Sarkozy a entamé ce mardi une peine de cinq ans de prison à la maison d’arrêt de la Santé, à Paris. Condamné pour complot en vue de financer illégalement sa campagne présidentielle de 2007 à l’aide de fonds libyens, il devient ainsi le premier ancien chef d’État français à être incarcéré depuis la Seconde Guerre mondiale.
Président de la République de 2007 à 2012, figure marquante de la droite française, Sarkozy rejoint tristement l’histoire aux côtés du maréchal Philippe Pétain, condamné à la réclusion à perpétuité pour collaboration avec le régime nazi. Cette condamnation marque l’épilogue d’une longue saga judiciaire autour d’accusations selon lesquelles la campagne de 2007 aurait bénéficié de millions d’euros versés par le régime de Mouammar Kadhafi, renversé et tué en 2011.
Le tribunal a reconnu Sarkozy coupable d’avoir comploté avec plusieurs de ses proches collaborateurs, tout en l’acquittant du chef d’accusation de réception ou d’usage personnel des fonds. Il a toujours nié toute faute, dénonçant une affaire « politique » et une volonté de « l’humilier ». Malgré son appel, la justice a ordonné l’exécution immédiate de la peine, estimant que la gravité des faits exigeait une mise à exécution sans délai.
L’ancien président avait déjà été condamné dans une autre affaire pour corruption et trafic d’influence, une peine qu’il purge actuellement sous surveillance électronique. Cette fois, il sera isolé dans une cellule individuelle, conformément aux mesures de sécurité appliquées aux personnalités publiques. Sa cellule, d’environ dix mètres carrés, dispose d’une douche privée et il aura la possibilité de louer une télévision pour 14 euros par mois ainsi qu’un téléphone fixe.
Dans un entretien accordé au Figaro, Sarkozy a confié qu’il emporterait avec lui trois livres, dont Le Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas, l’histoire d’un homme injustement emprisonné qui prépare sa revanche. Un choix chargé de symbolisme.
Cette incarcération, inédite dans la Ve République, illustre un changement profond dans la manière dont la France traite les affaires impliquant de hauts responsables politiques. Selon plusieurs juristes, les tribunaux français ordonnent de plus en plus souvent l’exécution immédiate des peines, même en cas d’appel, afin de répondre à la perception d’une impunité persistante.
Malgré la colère de ses soutiens et des figures de la droite, une majorité de Français approuve la décision : un sondage Elabe pour BFMTV révèle que 58 % des citoyens jugent le verdict juste, et 61 % soutiennent son application immédiate. Une page se tourne pour la justice française — et pour un homme qui fut jadis au sommet de l’État.
