Scandale à Jamaa el Fna : du langage obscène, cru aux condamnations hâtives, injustes. Un procès sans appel ?
Une vidéo virale au langage incorrect, portant atteinte à la pudeur publique et, par ailleurs, à la réputation d’un certain journalisme, s’est imposée le week-end dernier à Marrakech sur quelques réseaux sociaux. Indignations partagées et dénonciations exprimées sans retenue. Pourtant il ne s’agit que de quelques secondes sur une vidéo d’une quinzaine de minutes tournée le vendredi 4 juin par l’un des acteurs les plus singuliers de Jamaa el Fna. Célébrant à sa manière la réouverture de la Place ce film , tourné à la manière d’un reportage , nous apprend plus sur la dure période vécue par les hlaiqia durant le long confinement coronavirus et sur les conditions du retour à l’exercice de leur gagne-pain .
Est-ce cette légitime remarque qui a déplu aux journalistes croyant avoir suffisamment couvert la situation de ce haut lieu du patrimoine mondial immatériel et de l’image attractive de la première destination touristique du royaume ?
C’est aller vite en besogne sur la base de quelques subjectives observations d’un individu impoli. En réalité il ne s’agit ni d’un intrus malveillant , ni d’un dégoûtant personnage portant des accusations sans égards.
Abdelmajid , il s’agit bien de lui en fait. Il n’est pas un inconnu ni de la Place ni des réseaux sociaux. Il suffit de taper sur les moteurs de recherche son nom, en arabe ou en lettres latines, d’y ajouter les mots-clés Jamaa el Fna et Marrakech pour constater sa présence sur la Place et sa popularité sur le web. Sur pas moins d’une trentaine de vidéos ( datées une première fois 20 avril 2016 et , tout dernièrement , 18 février 2021 , d’une durée de 18 minutes 40 secondes).Elles racontent son parcours.
Ce n’est pas donc aujourd’hui qu’il faut le montrer du doigt, l’accuser d’être licencieux, le traîner devant la justice, de le faire exclure par ses collègues de la confrérie disparate des hlaiqia, le dénoncer aux autorités …
Obscène , il l’est. Sur la scène de Jamaa el Fna comme sur sa chaîne dédiée qui ne cesse de draguer les abonnés .Est-il un précurseur de ce qui devrait se faire à partir de la Place ? Des spectacles en présentiel et en distantiel, en virtuel ? En tout cas , bien avant le Covid 19 , il bénéficiait d’une large audience masculine en dehors de Marrakech . Une popularité à l’accent bahjaoui revendiqué , cultivant avec maestria, son talent demeure graveleux, cochon, pornographe… Bravo l’artiste ?
Choix contestable, mais inscrit dans une liberté d’expression qui doit être réelle sans être remise en question à la moindre incartade.
Peut-être sommes-nous devant un discutable exemple ou un mauvais goût plus supportable hors de la scène de Jamaa el Fna .
La notion de morale, comme on le sait, varie considérablement selon les cultures et l’Histoire .
Abdelmajid a ouvert une boîte de Pandore. Un écart de langage s’instruit. Et aurait même dû passer inaperçu sans doute .
La Place Jamaa el Fna a besoin de toutes les bonnes volontés, pas de bonnes consciences autosatisfaisantes. Qui peut affirmer que tout a été fait et bien fait dans la ligne et l’esprit de ce grand ould Jamaa el Fna, Juan Goytisolo ? Ce regretté écrivain engagé , par qui est arrivé la consécration Jamaa el Fna, patrimoine culturel universel de l’humanité
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